La croissance phénoménale observée dans l’industrie du cinéma et de la télévision au cours de la dernière décennie apporte une réponse claire à cette question. Les tournages étrangers constituent sans l’ombre d’un doute un puissant levier de croissance en regard des retombées économiques qui y sont rattachées. Mais cela passe par des investissements importants en infrastructures!

En 2018-2019, au Québec seulement, la production cinématographique et télévisuelle représentait environ deux milliards de dollars. Cela comprend la production de longs métrages de fiction, de documentaires, de séries télévisées et de productions télévisuelles. De cette somme, la moitié, soit près d’un milliard, est attribuable aux productions étrangères, dont 350 à 400 millions représentent les tournages. Un volume qui stagne depuis 2017, alors qu’on observait des retombées directes de 383 millions. Les 600 millions restants sont générés par les secteurs des effets visuels et de l’animation, qui connaissent une croissance annuelle dépassant les 20 % depuis plus d’une dizaine d’années.

Cela étant, pour accueillir davantage de tournages à Montréal, il faudra doter la ville de nouvelles infrastructures répondant aux standards de l’industrie. En clair, il manque de studios de tournage pour relancer la croissance de ce secteur. À titre d’exemple, Montréal compte environ 425 000 pi2 de studios de tournage; à Toronto, c’est 2,3 millions; à Vancouver, 2,5. Les volumes d’affaires observés dans ces trois villes illustrent clairement le corollaire entre espace d’accueil et volume d’affaires. Depuis plus de quinze ans, les studios américains disent à l’unisson « build it and we’ll come ». D’autres villes ont entendu l’appel avant nous et profitent aujourd’hui de l’augmentation du volume de productions destinées aux grands marchés. Une réalité devenue encore plus pressante alors que, toutes plateformes confondues, les banques de programmes, séries, films et autres courts métrages ont été dévalisées par les consommateurs au cours des longs mois de pandémie.

La solution : doubler l’espace d’accueil au cours des prochaines années. Un tel investissement, évalué à près de 400 millions de dollars, a le potentiel de générer des retombées de centaines de millions annuellement, de créer près de 5000 emplois (ETP) bien rémunérés et d’apporter une plus grande stabilité sur le plan de la saisonnalité à l’ensemble des travailleurs du secteur. Une fenêtre d’opportunités bien réelle s’ouvre à nouveau sur Montréal. Le potentiel innovateur d’un tel projet est immense : construction verte, transformation écoresponsable de la chaîne industrielle, intégration de nouvelles technologies pour la production virtuelle, mise en valeur de notre patrimoine énergétique et création d’un écosystème incluant une multitude de fournisseurs spécialisés venus s’installer à proximité. Une manière de parc industriel entièrement dédié à la production audiovisuelle, une Cité du cinéma aux couleurs du XXIe siècle.

Pourquoi pas? Et pourquoi pas ici!

Au cours des derniers mois, plusieurs acteurs industriels ont collaboré pour rassembler l’ensemble des données probantes. Le portrait est clair et le potentiel de croissance bien réel. Les dernières analyses démontrent que plus de 75 % des dépenses de production effectuées lors d’un tournage étranger constituent des retombées directes et plus de la moitié de cette somme, soit 57 %, est versée en salaires à des travailleurs québécois.

À l’instar des secteurs des effets visuels et de l’animation, qui ont généré une croissance de plusieurs centaines de millions de dollars au cours des dernières années, l’implantation de nouvelles infrastructures d’accueil pour les tournages pourrait redonner à ce secteur un espace de croissance non négligeable pour les années à venir. La table est mise!

Pierre Moreau

M. Moreau est président-directeur général du Bureau du cinéma et de la télévision du Québec qui a pour mission de contribuer au développement et à la compétitivité du Québec comme centre de production cinématographique et télévisuelle de calibre international.