Les 8, 9 et 10 octobre derniers ont donné lieu à un rassemblement sans précédent de dirigeants et professionnels de médias, de chercheurs et d’observateurs avisés de l’univers médiatique francophone, pour débattre des enjeux technologiques, organisationnels et économiques des médias francophones à l’ère numérique.

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Cette rencontre s’est amorcée avec le colloque Médias et francophonie : modèles d’affaires et nouveaux publics (8 octobre) organisé par le Pôle médias HEC Montréal et ses partenaires. Les conférenciers conviés à cette journée se sont intéressés aux bouleversements des modèles économiques et à leur répercussion sur la stratégie des organisations de médias, à la transformation des usages, aux effets de la règlementation nationale et supranationale, ainsi qu’aux repères et à la fonction du concept de marque francophone. Ces conférences étaient suivies d’une table-ronde à laquelle se sont joints Rémy Pflimlin, président-directeur général de France Télévisions, Matthieu Gallet, président de Radio France, Marie-Christine Saragosse, présidente de France Médias Monde, Louis Lalande, vice-président des services français de Radio-Canada, et Sylvain Lafrance, Directeur du Pôle médias HEC Montréal, afin de dégager des pistes de réflexion et de débattre du rôle que doivent jouer les grands diffuseurs publics francophones face à ces multiples défis.

Ce grand rassemblement sur les médias francophones s’est poursuivi dans le cadre de la Conférence internationale sur l’avenir des médias francophones (8-9-10 octobre) organisée conjointement par l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF) et le Pôle médias HEC Montréal. C’est en présence de l’Honorable Christian Paradis, Ministre du Développement international et de la Francophonie du Canada, de Madame Sylvie Barcelo, Sous-ministre de la Culture et des communications du Québec, de Clément Duhaime, Administrateur de l’Organisation Internationale de la Francophonie, et de M. Jean Charest, Premier ministre du Québec (2003-2012), que la Conférence a pris son envol. Les intervenants de cette conférence avaient pour mandat d’identifier des recommandations concrètes pour l’OIF afin d’agir face à la mutation de l’espace médiatique francophone. Parmi les experts invités par l’OIF et le Pôle médias HEC Montréal figurent Mactar Silla, Président-directeur général MS Consulting et Directeur général d’Africa Communications et Conseils, Dominique Gallet, Producteur-délégué du magazine télévisé Espace francophone, France 3, Yves Bigot, Directeur général de TV5Monde et Margareta Stroot, Présidente du Club suisse de la Presse et de la section moldave de l’Union de la presse francophone.

La qualité des intervenants, la richesse des débats et la prise de conscience partagée à l’égard des défis auxquels les médias francophones sont confrontés, nous confirment la pertinence de l’engagement du Pôle médias HEC Montréal et de ses partenaires dans cette réflexion. Nous rendrons disponible sous peu le compte-rendu et les vidéos de cette grande rencontre qui marque le début d’une réflexion structurante et pérenne sur l’avenir des médias francophones.


 Journée du 8 octobre

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PowerPoint des conférenciers :

Vidéo des conférences complètes :

Compte-rendu colloque (Format PDF)


 Journées des 9 et 10 octobre


Rapport général (Format PDF)
Par Monsieur Ibrahim SY SAVANÉ,
Rapporteur général de la Conférence


Conclusion et recommandations
Synthèse (Format PDF)

Les débats de la Conférence internationale sur l’avenir des médias francophones ont souligné la rapidité et l’ampleur des mutations dans le domaine de la technologie et des usages du public et leurs impacts importants – économiques, éditoriaux et organisationnels – sur le monde des médias traditionnels.

Dans l’espace francophone, comme ailleurs, les changements en cours remettent en question la viabilité économique des médias « traditionnels » et questionnent les compétences des professionnels.

Face à cette situation déstabilisante pour l’industrie des médias, les participants ont insisté sur quatre axes essentiels dans les années à venir : l’innovation ; la formation ; les contenus ; la distribution.

Avant de s’engager plus avant dans le débat, les participants ont également tenu à rappeler la place et le rôle particulier des médias dans l’économie de la culture et de l’information, en soulignant le primat du culturel sur le marché et celui du citoyen sur le consommateur.

Dans cette optique, ils ont appelé les États et gouvernements à se saisir à nouveau des questions traitées en 2005 par la Convention de l’UNESCO sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles pour en adapter le contenu aux enjeux nouveaux générés par la généralisation du numérique, l’accès au réseau et la convergence des médias.

[su_accordion class= »toggle »] [su_spoiler title= »I/ Innovation« ]

L’innovation constitue une ardente obligation ont constaté les professionnels réunis à Montréal. Qu’il s’agisse des modèles économiques, des formats éditoriaux, des solutions techniques ou des modes d’organisation, les participants ont convenu que le secteur des médias sera profondément remodelé dans les années à venir. Un consensus a également semblé émerger autour de l’idée qu’il n’existera pas de modèle unique dans l’avenir mais plutôt une diversification des dispositifs mis en œuvre.

Dans ce contexte, les professionnels ont insisté sur l’importance des échanges d’expérience entre eux qui pourrait se formaliser en un répertoire des bonnes pratiques (contenant également l’analyse des échecs).

Dans la perspective de favoriser l’innovation, la mise en place d’un laboratoire francophone de l’innovation média a également été recommandée. Réunissant des professionnels des contenus, de la technologie et des chercheurs, ce laboratoire pourrait creuser des axes de recherche/développement et mettre au point des prototypes au service de l’ensemble de la communauté francophone en privilégiant le recours aux logiciels libres.

[/su_spoiler] [su_spoiler title= »II/ Formation« ]

La formation est une autre priorité des années à venir, a souligné la grande majorité des participants. Dans un contexte d’évolution rapide, la capacité d’adaptation des ressources humaines constitue l’un des facteurs-clefs de réussite, d’autant plus que la mutation numérique implique non seulement un renouvellement des compétences mais également un changement d’état d’esprit tant elle modifie le contexte des médias (interactivité décuplée, concurrence démultipliée, primat de l’innovation).

Dans le domaine de la formation initiale, un aggiornamento des cursus s’impose notamment dans les écoles de journalisme. Bien engagée dans certains pays, cette refonte des programmes impose de rompre avec un certain académisme et de mettre les centres de formation en situation d’innovation pédagogique pour répondre aux besoins de médias qui sont en train de se réinventer. Renforcement des relations avec le monde professionnel et ses évolutions rapides, professionnalisation accrue de l’enseignement, refonte des contenus et des méthodes pédagogiques constituent autant d’impératifs, selon les participants à la Conférence de Montréal. Dans cette perspective, le renforcement de la coopération et des échanges entre les centres de formation francophones apparaît comme une nécessité.

Dans le domaine de la formation continue, c’est le format traditionnel du stage de formation qui ne semble plus entièrement adapté aux besoins, notamment pour insuffler une « indispensable culture du changement ». Les intervenants ont souligné la nécessité d’envisager la formation comme un processus continu tout au long de la vie professionnelle en mentionnant l’intérêt que peut représenter le développement de dispositifs plus légers ou accessibles à la demande comme les formations en ligne. Dans le même ordre d’idée, un participant a proposé de favoriser les échanges temporaires de journalistes à l’intérieur de l’espace francophone (afin de partager les savoir-faire et pour accroître la connaissance réciproque). Par exemple, un journaliste suisse viendrait quatre semaines au sein d’un média sénégalais avant que l’échange inverse n’ait lieu quelque temps plus tard.

[/su_spoiler] [su_spoiler title= »III/ Contenus« ]

Les contenus, leur qualité et leur diversité constituent un autre point critique aux yeux de nombreux participants à la Conférence de Montréal. Evoquant un risque de marginalisation des contenus francophones et sonnant l’alarme quant à la baisse continue des ressources des médias de service public, les participants ont fortement insisté sur l’impératif de qualité auquel les professionnels des médias doivent se tenir. Critère essentiel au moment où des contenus de toutes origines et de toutes catégories prolifèrent sur les écrans, la qualité est le résultat d’un processus et de l’ensemble des facteurs qui le composent. Reste à trouver les critères d’appréciation de la qualité de manière à pouvoir la soutenir et l’encourager. Le sujet – dans la mesure où il apparaît comme central – mérite sans doute d’être approfondi sous la forme d’une étude spécifique sur ce point.

En effet, l’idée évoquée à Montréal d’une labellisation des contenus de qualité n’est pas sans poser des difficultés opérationnelles considérables. Une autre voie pourrait être de favoriser la création d’observatoires nationaux de la déontologie de l’information qui seraient en mesure de signaler les dérives constatées.

[/su_spoiler] [su_spoiler title= »IV/ Distribution« ]

La distribution des contenus francophones apparaît aux professionnels comme un enjeu critique à l’ère des plateformes mondialisées (YouTube, Netflix, etc) et dans la perspective d’une multiplication des canaux de diffusion liée à la généralisation de la TNT. Tous ont insisté sur le besoin d’une plus grande circulation des contenus au sein de l’espace francophone et en dehors. Pour réaliser cette ambition, l’idée d’une plateforme d’échange de contenus audiovisuels a été évoquée à plusieurs reprises, même si quelques tentatives dans ce domaine n’ont pas été couronnées du succès espéré par le passé. Dans le domaine juridique, l’existence de réglementations nationales différentes en matière de droit d’auteur a été soulignée comme une entrave à la circulation des contenus. L’idée a été émise de pouvoir négocier les droits de diffusion d’une œuvre pour une langue donnée et non plus pour un territoire donné.

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Cette première Conférence internationale sur l’avenir des médias francophones a été saluée comme un succès par les participants pour la qualité des interventions mais aussi pour la richesse des échanges qui ont pu avoir lieu entre eux. Dans la perspective de resserrer les liens entre les acteurs des médias francophones et de développer une réflexion originale sur les évolutions en cours, l’idée de pérenniser le rendez-vous et d’en faire une plateforme d’échange durable a été plébiscitée. De prochaines éditions pourraient être envisagées sur des thématiques particulières comme celle des « villes intelligentes ».